dimanche 12 août 2012
Continuer à voyager au Brésil ....immobile
Comme je ne peux plus voyager à l'extérieur des frontières, j'ai cherché d'autres types de voyages ...heureusement plus de 10 voyages au Brésil toutes ces années me permettent de me projeter des "films intérieurs" .
Depuis quelque semaines , je dévore des livres très différents mais qui cultivent un peu plus ma perception du Brésil.
Gràce à notre bibliothèque municipale , j'ai découvert un auteur Jean Paul Delfino ; d'abord avec deux romans historiques, saga : ZUMBI et Pour tout l'or du Brésil.
Ecriture facile, riche d'informations sur la traite négrière qui a fait la richesse des colons ,souffrance des esclaves considérées comme des animaux sans âmes ....tout ceci cautionné par l' Eglise .
J' y ai trouvé des pistes de réflexions sur ce qui fait la personnalité toute particulière de ce peuple si métissé, si attachant , pétri de gaité et d'infinie "saudade".
Je met sur ces pages les images que je retiens de Diamantina, que j'ai "adorée" et du chemin de l'or (caminho do Ouro ) tant de souffrances pour enrichir la Couronne Portuguese ! et tous les commerces vers l' Europe .
J'avais été frappée au musée de Diamantina ,où , l'histoire du diamant et de son apparat est retracé , mais où la plupart des pièces présentaient les intruments de tortures , ou de mauvais traitements des esclaves . jougs, chaines, fouets ....
J'en étais sortie avec un profond malaise .
Ainsi cette région que j'aime Minas Gerais porte sur toutes ses églises magnifiques et magnifiées , l'or , de tant de tortures !
églises d'Ouro Preto par exemple .
A travers ces romans on apprend aussi comment aux origines seulement 2000 européens occupaient ces terres à "coloniser" ....la plupart des renégats, chassés du Portugal .
Fenêtre à Moucharabieh -Diamantina- commerçant de Diamants- voir sans être vu
Plus léger ! je lis du même auteur un livre sur les musiques brésiliennes populaires
BRASIL : a mùsica .re-Visite historique et musicale
Et comme je n'en ai jamais assez , en parallèle , je voyage dans la région de Bahia avec Jorge AMADO TOCAIA GRANDE !
Attendent sur la pile , Embrouille de CHICO BUARQUE (ESTORVO)roman , je découvre qu'il a écrit autre chose que des chansons!
O MATADOR Patricia Melo ( le tueur )
- Les Deux Pigeons
je dédie ce message à mes deux voisins de 87 ans .
Jamais l'un sans l'autre .
Monsieur avec sa canne , et Madame toujours tirée à quatre épingles , un petit mot gentil, pommettes roses et chapeau bien mis .
UN brin de douceur dans notre monde agité.
Madame n'a pas survécu six mois au départ de son compagnon .Plus de soixante ans de vie , commune, "soulier contre soulier".
J'admirais cette espèce de mimétisme qui fait , qu'on est rassuré .
Quand on voit l'un, l'autre n'est pas loin .
Alors j'espère que maintenant vous volez libres dans le ciel, l'un prêt de l'autre !
LES DEUX PIGEONS
Deux Pigeons s'aimaient d'amour tendre.
L'un d'eux s'ennuyant au logis
Fut assez fou pour entreprendre
Un voyage en lointain pays.
L'autre lui dit : Qu'allez-vous faire ?
Voulez-vous quitter votre frère ?
L'absence est le plus grand des maux :
Non pas pour vous, cruel. Au moins que les travaux,
Les dangers, les soins du voyage,
Changent un peu votre courage. (1)
Encore si la saison s'avançait davantage !
Attendez les zéphyrs : qui(2) vous presse? Un Corbeau
Tout à l'heure annonçait malheur à quelque Oiseau.
Je ne songerai(3) plus que rencontre funeste,
Que Faucons, que réseaux (4). Hélas, dirai-je, il pleut :
Mon frère a-t-il tout ce qu'il veut,
Bon soupé, bon gîte, et le reste ?
Ce discours ébranla le coeur
De notre imprudent voyageur ;
Mais le désir de voir et l'humeur inquiète
L'emportèrent enfin. Il dit : Ne pleurez point :
Trois jours au plus rendront mon âme satisfaite ;
Je reviendrai dans peu conter de point en point
Mes aventures à mon frère.
Je le désennuierai :quiconque ne voit guère
N'a guère à dire aussi(5). Mon voyage dépeint (6)
Vous sera d'un plaisir extrême.
Je dirai : J'étais là ; telle chose m'avint(7) ;
Vous y croirez être vous-même.
A ces mots en pleurant ils se dirent adieu.
Le voyageur s'éloigne ; et voilà qu'un nuage
L'oblige de chercher retraite en quelque lieu.
Un seul arbre s'offrit, tel encor que l'orage
Maltraita le Pigeon en dépit du feuillage.
L'air devenu serein, il part tout morfondu,
Sèche du mieux qu'il peut son corps chargé de pluie,
Dans un champ à l'écart voit du blé répandu,
Voit un Pigeon auprès : cela lui donne envie :
Il y vole, il est pris : ce blé couvrait d'un las (8 )
Les menteurs et traîtres appas.
Le las était usé : si bien que de son aile,
De ses pieds, de son bec, l'oiseau le rompt enfin.
Quelque plume y périt : et le pis du destin
Fut qu'un certain vautour à la serre cruelle,
Vit notre malheureux qui, traînant la ficelle
Et les morceaux du las qui l'avaient attrapé,
Semblait un forçat échappé.
Le Vautour s'en allait le lier(9), quand des nues
Fond à son tour un aigle aux ailes étendues.
Le Pigeon profita du conflit des voleurs,
S'envola, s'abattit auprès d'une masure,
Crut, pour ce coup, que ses malheurs
Finiraient par cette aventure ;
Mais un fripon d'enfant, cet âge est sans pitié
Prit sa fronde, et, du coup, tua plus d'à moitié
La Volatile (10) malheureuse,
Qui, maudissant sa curiosité,
Traînant l'aile et tirant le pié,
Demi-morte et demi-boiteuse,
Droit au logis s'en retourna :
Que bien, que mal elle arriva
Sans autre aventure fâcheuse.
Voilà nos gens rejoints ; et je laisse à juger
De combien de plaisirs ils payèrent leurs peines.
Amants, heureux amants , voulez-vous voyager?
Que ce soit aux rives prochaines ;
Soyez-vous l'un à l'autre un monde toujours beau,
Toujours divers, toujours nouveau ;
Tenez-vous lieu de tout, comptez pour rien le reste.
J'ai quelquefois(11) aimé : je n'aurais pas alors
Contre le Louvre et ses trésors,
Contre le firmament et sa voûte céleste,
Changé les bois, changé les lieux
Honorés par les pas, éclairés par les yeux
De l'aimable et jeune bergère
Pour qui, sous le fils de Cythère (12),
Je servis, engagé par mes premiers serments.
Hélas! Quand reviendront de semblables moments?
Faut-il que tant d'objets si doux et si charmants
Me laissent vivre au gré de mon âme inquiète?
Ah! si mon coeur osait encor se renflammer!
Ne sentirai-je plus de charme qui m'arrête?
Ai-je passé le temps d'aimer?(13)
Jean de la Fontaine
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